Management Par les Contraintes – Philip Marris

Chapitres / Livre 1 (1994, 1997 et 2000) / Usines de types V, A et T

Les usines de types V, A et T

On distingue trois types de production, V, A et T, car si l'on représente le flux des matières à travers la production avec l'entrée des matières premières en bas et l'expédition des produits finis en haut, ces trois lettres apparaissent. Chaque type pose des problèmes spécifiques, nécessitant par exemple une technique personnalisée d'identification des contraintes.

 

vat

Il est regrettable que "l'analyse VAT" n'ait connu qu'une diffusion très limitée, car elle est d'un apport considérable lors des étapes d'analyse du déséquilibre existant et elle apporte par la même occasion une réponse aux sceptiques qui considèrent leur usine comme presque équilibrée.

La typologie dite en V correspond souvent à des industries de première ou deuxième transformation dans lesquelles il y a, en général, plus de références différentes de produits finis que de types différents de matières premières.

Le type en A regroupe les entreprises à prédominance d'assemblage mais dont la gamme de produits finis est limitée. Les produits achetés sont plutôt des composants ou des matières qui vont subir leur deuxième ou troisième transformation.

L'usine en T est une évolution du type en A. Pour alimenter directement le marché une entreprise est obligée d'accroître l'éventail des produits offerts. Une usine en T cherche donc à concilier la production de masse et la personnalisation des produits. Pour ce faire, elle exploite les options explicites et implicites. L'assemblage final, l'ultime étape de la production, regroupe plusieurs sous-ensembles différents pour créer un produit fini personnalisé correspondant à un créneau du marché ou aux besoins d'un client individuel. Les sous-ensembles sont communs à plusieurs types de produits finis différents.

 

Les productions en V

Exemples

Métallurgie, sidérurgie, plasturgie, l'industrie textile, production de papier, processus continu et semi-continu, chimie, fonderie, fabrication de circuits imprimés, producteurs de semi-conducteurs, imprimeries.

 

Caractéristiques et problèmes

  • Plus de différentes références de produits finis que de matières premières et de composants. Ceci reflète l'existence de "points de divergence" ; des transformations par une machine d'une matière qui, en fonction des réglages, produira différents produits.
  • Presque tous les produits sont élaborés de la même manière ; une ressource travaille sur le produit toujours au même niveau dans le processus (à la énième opération de la gamme), le caractère de l'opération est plus générique, l'équipement est peu polyvalent.
  • L'outil de production représente un investissement important ; la composante de main-d'oeuvre dans le prix de revient est relativement faible. Les modifications du processus nécessitent donc des investissements élevés.
  • Certaines de ces entreprises ont un long passé, les mauvaises habitudes sont donc plus fermement ancrées dans les moeurs.
  • Elles sont plus préoccupées par la maîtrise des coûts que par la réactivité.
  • Elles fabriquent en général de grandes quantités en peu de temps. Souvent seules les capacités de stockage limitent le niveau des stocks. D'importants moyens de suivi sont donc nécessaires.
  • Si le goulot a un long temps de changement de série, il y aura d'importants stocks de produits finis et un respect des délais en chameaux (des avances et des retards).

 

Comment trouver les contraintes

L'analyse du profil des en-cours permet d'identifier la contrainte. Avant le goulot les ateliers sont submergés par les en-cours, et après ils n'arrivent pas à se procurer suffisamment de matière pour assurer leur plein emploi.

 

Comment gérer l'existant

  • Mettre en oeuvre la technique de synchronisation avec si possible le traitement des commandes intégré.
  • Souvent on accordera à des ressources non-goulots mais peu flexibles le droit d'opérer des regroupements des lots en attente pour limiter les pertes de débit dues aux changements de série, mais en parallèle on s'efforcera d'améliorer leur flexibilité.
  • Il faut résister à la tentation de gérer deux machines en ligne comme des contraintes. L'une d'elles doit être transformée en non-goulot en la dotant d'un excédent de capacité.
  • Rechercher tous les moyens de réduire les tailles des lots (à la fois de transfert et de production). Les temps de changement de série doivent être écourtés même si souvent les ressources ne s'y prêtent guère.
  • La stratégie d'accroître la demande par le biais de délais et de quantités de livraisons réduits est souvent très intéressante, malgré l'impression que peut donner le marché de ne s'intéresser qu'aux coûts.

 

Comment investir

  • Avec soin car l'activité est "capitalistique".
  • Si il est reconnu que le coût réel des stocks est en réalité plusieurs fois plus important que dans l'estimation traditionnelle, de nombreux investissements visant à accroître la flexibilité du processus deviennent rentables.
  • La réduction importante des niveaux d'en-cours qui devrait découler de la Phase 1 dégagera souvent de la surface entre les machines où l'on pourra installer d'anciennes ressources qui, avec des efforts d'autonomation et de Contrôle Statistique du Processus, pourront à nouveau jouer un rôle utile.

 

Les productions en A

Exemples

Producteurs de biens intermédiaires (pompes, moteurs, radiateurs, etc.) tels que les fournisseurs et sous-traitants du secteur automobile et de l'électroménager, mais également de produits sophistiqués, coûteux, et/ou spécialisés : aéronautique, spatial,

 

Caractéristiques et problèmes d'une production en A
  • Un ou plusieurs stades d'assemblage.
  • Un grand nombre de composants fabriqués et achetés sont assemblés pour constituer un éventail relativement limité de produits finis différents. Il y a donc plus de références de composants et de matières premières que de produits finis.
  • La standardisation est limitée. Les produits finis sont fabriqués à partir d'un assemblage de sous-ensembles qui leur sont spécifiques.
  • Les clients sont en général d'autres entreprises plutôt que des clients individuels.
  • Les machines sont assez polyvalentes et travaillent sur toute une famille de composants. Il est assez fréquent qu'un composant passe plusieurs fois sur la même machine à différents stades de la gamme.
  • Les machines sont souvent regroupées en ateliers fonctionnels (structure "Job-shop"). Les circuits des produits sont donc en "plats de spaghetti". Quand ce n'est pas le cas, c'est que l'activité est suffisamment répétitive pour permettre à l'entreprise de créer des cellules de production regroupant les machines nécessaires à la fabrication d'une famille de produits.
  • Les taux d'utilisation des machines et de la main-d'oeuvre sont faibles, avec des surcharges sporadiques et imprévisibles absorbées avec des heures supplémentaires. De ce fait, les dépenses d'exploitation sont excessives et préoccupantes.
  • La production souffre de "goulots baladeurs" qui se déplacent de semaine en semaine ou de mois en mois d'un endroit à un autre de l'usine.
  • L'assemblage est continuellement confronté au problème des manquants et ce malgré les niveaux des stocks de composants et de sous-ensembles globalement excessifs.
  • Les taux de respect des délais sont souvent mauvais.
  • Le manque de synchronisation et les mauvais taux d'utilisation sont perçus comme étant un manque de rigueur et de contrôle.
  • La fabrication a tendance à utiliser des lots de tailles importantes ("économiques", voire "très économiques").

 

Les productions en T

Exemples

Fabricants d'automobiles, d'électroménager, de hi-fi, de meubles, de serrures, de photocopieurs, d'ordinateurs, de machines-outils, d'outillage électrique ou pneumatique, d'ascenseurs, etc.

 

Caractéristiques et problèmes d'une production en T
  • Beaucoup des sous-ensembles sont communs à plusieurs différents types de produits finis (la "différenciation retardée").
  • Importants problèmes de respect des délais : de nombreuses commandes sont en avance ou en retard, mais peu sont livrées juste au bon moment (typiquement un tiers dans chaque cas).
  • La fabrication et la plupart des approvisionnements sont déclenchés sur prévisions, tandis que l'assemblage final se fait sur commandes externes ou internes (provenant des services commerciaux ou du circuit de distribution).
  • Pour pouvoir répondre rapidement aux besoins du marché, ces entreprises ont souvent un excédent de capacité (surtout au niveau de l'assemblage final). On y trouve donc rarement des goulots saturés.
  • On fait souvent la distinction entre deux entités : l'assemblage final et la fabrication. La fabrication amont (un mélange de V et de A) peut être réalisée sur le même site, dans une autre usine du groupe, chez des sous-traitants ou tout simplement chez des fournisseurs complètement indépendants. Ce qui importe c'est l'existence d'un assemblage final effectué à partir de sous-ensembles communs.
  • Nomenclature très complexe entre sous-ensembles et produits finis (parfois gérée sous forme de matrices) entraînant de nombreuses erreurs.
  • L'affectation des pièces aux commandes se fait en général au niveau des sous-ensembles avant l'assemblage final. Mais il y a là également nombre de réaffectations plus ou moins sauvages ainsi que de la "cannibalisation" (démonter un produit fini ou presque fini pour lui retirer des éléments nécessaires à une commande plus urgente). De telles actions sont encouragées par les objectifs des volumes d'expéditions imposés à l'assemblage final. Ceci peut créer un phénomène de fin de mois prononcé.
  • De très importantes quantités de sous-ensembles en attente avant l'assemblage final mais aussi de nombreux manquants.
  • Beaucoup d'heures supplémentaires un peu partout malgré des taux d'utilisation des ressources faibles et en particulier l'assemblage final (souvent inférieur à 40%).

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